Véronique Joffre, architecte: "Le sens, la forme"

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Véronique Joffre architecte diplômée en 1990, a créé son agence en 1991. Depuis 2000, elle vit et travaille à Toulouse. Depuis 2006, elle enseigne le projet dans les cycles licence et Master à l’ENSA Toulouse.

Esprit léger de la Nature

Une des premières réalisations remarquée de Véronique Joffre, aussitôt primée et publiée, date de 1997, il s’agit de la réinsertion de la centrale hydroélectrique d’Albas dans le Lot : élégance, transparence, légèreté structurelle… légèreté tout court : comme ces vérités qui arrivent sur des pattes de colombe, dirait Nietzsche. Une véritable métamorphose pour une construction hydroélectrique d’un genre qui incline souvent à la puissante expression architectonique du béton armé.

Dès le groupe scolaire Paul Cayla, quelques années plus tôt, comme dans ses œuvres ultérieures jusqu’à ce jour, se dégage une manière toute personnelle derrière une apparente impersonnalité de style : rien d’imposant, et pourtant cela s’impose, avec cette nécessité polie et rigoureuse, avec une constante grâce d’invention. Cette architecture, étrangère aux effets de mode, assume les formes issues des nécessités constructives dans leur plus simple appareil, sans afféteries, sans jamais rien de formel, de rhétorique, de superflu, rappelant la belle formule d’Auguste Rodin : « tout ce qui n’est pas essentiel est étranger à l’art ».

Et c’est sans revendication aucune, sans signe ni posture, avec une intégrité dépourvue de toute rigueur dogmatique, minimale sans minimalisme, moderne sans modernisme, originale sans originalité, que cette œuvre s’impose en effet, projet après projet, avec cette remarquable constance d’écriture et d’attitude qui signe une véritable architecture — fait matériel et spirituel à la fois, physique au plein sens du mot physis par lequel les anciens grecs désignaient la nature.

Si cette architecture au-delà de ce fait naturel — car tout jusqu’en nos œuvres les plus technique appartient encore à la nature — est également un langage avec sa syntaxe et son vocabulaire qui nous parle, elle ne nous dit jamais rien d’autre qu’elle-même, et ne veut être qu’elle-même. C’est en cela sans doute qu’elle possède ce pouvoir, comme la musique, de nous émouvoir immédiatement, sans la médiation d’aucun concept, sans représentation ni signification. Elle s’impose alors dans sa vérité première, comme un fait naturel qui jamais ne fut conçu pour nous plaire, mais qui exprime un monde de nécessité rigoureuse et cette aspiration première à l’être qui est à la source de toute vie, de toute joie, de toute création authentique.


Stéphane Gruet, le 23 janvier 2010 (source: cmaville.org)
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